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par | 21 septembre 2025

« On n’a clairement pas l’effectif pour gagner » : quel rôle pour le coach ?

Dans l’imaginaire collectif, le rôle du coach est simple : conduire son équipe à la victoire. Mais la réalité est parfois un peu + complexe !

Tous les collectifs n’ont pas le même niveau, les mêmes talents ou les mêmes ressources. Et tout simplement certaines saisons ou certains championnats, malgré toute l’énergie et la préparation qui peuvent être données, la victoire n’est juste pas accessible.

Alors, quel travail pour le coach ? Doit-on se résigner à la défaite ?

Il me semble que c’est précisément dans ces situations que le travail du coach prend toute sa valeur. Le rôle du coach n’est pas seulement de viser un résultat, mais de développer son équipe et lui permettre de donner sa meilleure performance possible.

 

Un coach lucide sait reconnaître quand l’écart est trop grand pour espérer l’emporter. Cela signifie-t-il automatiquement qu’il renonce ?

Les points qui me semblent importants :

  • Les objectifs : quel objectif donner à son équipe ? J’ai en mémoire un échange récent avec un ancien coach international médaillé à plusieurs reprises qui me dit « Tu rentres sur le terrain pour gagner. Point ». Si je vois bien la raison derrière cette injonction, qu’en est-il de la motivation à long terme ? Jouer pour gagner et se prendre des « branlées » à chaque match … pas simple pour maintenir l’engagement et l’investissement de ses joueurs quand la saison est longue !

Certains coachs utilisent alors d’autres objectifs, + réalistes et + en phase avec le niveau de perf possible de l’équipe : réduire l’écart de points, améliorer le ranking, appliquer une nouvelle tactique, … La science a pu démontrer déjà que ce type d’objectif permet l’engagement tout en prend soin de la motivation à long terme.

Et justement,

  • Préserver la motivation : si l’unique horizon reste la victoire, le découragement viendra inévitablement. Il semble donc important de mettre en avant d’autres sources de satisfaction et de progression.
  • Donner du sens : rappeler que chaque confrontation, même perdue, est une opportunité d’apprentissage et de développement. Et même si cela est pénible au bout d’un moment ; difficile de toujours parler d’apprentissage, un sportif (et un coach !!) a besoin de gagner aussi !

J’ai en mémoire, il y a quelques années, un coach de CDF qui m’expliquait que sa mission était de sortir des talents, donc de développer chaque jeune, mais en même temps, pointait que sans victoire de l’équipe, pas de mise en lumière des talents individuels. Une dualité que connaissent bien les entraineurs.

Un exemple

Il m’est arrivé d’accompagner un coach gardien qui devait participer à une compétition avec deux gardiens qui n’avaient pas le niveau de cette-dernière. Il était frustré et m’expliquait qu’il ne pourrait pas y arriver. Arriver à quoi ? > leur permettre d’obtenir le niveau de la compétition en si peu de temps. Nous avons travaillé à revoir l’angle de vision. De son objectif de coach de développer des gardiens de haut niveau (qui reste bien sûr son job !), nous avons posé pour cette compétition spécifiquement qu’il permette à ses deux goalies de donner leur meilleur niveau. Cela a permis au coach de ne plus être dans la frustration et les pensées négatives qui empêchaient sa propre performance. Et de travailler efficacement avec ses gardiens pour les mettre dans les meilleures conditions. Au final, le moins performant des deux s’est révélé au-delà de toute espérance et a permis de sauver des matchs. 👉Avec cet exemple je veux mettre en perspective le rôle indispensable du coach dans la performance à travers sa capacité à placer le curseur au bon endroit. Lucidité et stratégie.

Résultat vs performance : le cadre théorique

La distinction entre résultat et performance est fondamentale en psychologie du sport (et donc pour le coach).

  • Le résultat est externe, souvent binaire (gagner/perdre). Il dépend aussi d’éléments incontrôlables : adversaire, arbitre, conditions extérieures…
  • La performance est interne : elle se réalise par l’investissement, la qualité de jeu, la progression technique, la cohésion collective.

👉 Cette distinction est proche de la théorie des objectifs de résultat vs objectifs de performance (Locke & Latham, 1990). Quand le résultat n’est pas atteignable, le coach recentre son équipe sur la performance, qui elle, reste toujours accessible.

 

On pourrait penser que lorsqu’il sait que son équipe ne peut pas gagner, le coach ne peut que baisser les bras. Mais c’est tout l’inverse. Son rôle devient encore + exigeant, car il doit gérer deux missions à la fois :

  • Garder l’ambition de la victoire
  • Même si elle est hors de portée, elle reste un repère. Elle fixe une direction et nourrit la motivation,
  • Accompagner le développement et la performance
  • Le coach recentre son travail sur ce qui dépend réellement de l’équipe : l’effort, la cohésion, la progression individuelle et collective.

Je crois fondamentalement que c’est dans cette tension entre ambition et lucidité que se trouve la richesse du coaching.